La dérive française : l'incapacité à travailler ensemble.

"Français et Américains, l’autre rive"  Extraits


Français et Américains, l’autre rive” by Pascal Baudry
3rd edition (October 2007), in French
© Ed. Village Mondial/Pearson
ISBN: 2-7440-6101-8

Chapitre 6 : La tâche

...lorsqu’un Américain rencontre un autre Américain, ils partagent une même référence à la loi. Ils se réunissent parce qu’ils ont une tâche à faire en commun. Peut-être sont-ils, l’un supervisor et l’autre sales clerck dans un magasin ; la tâche de ce tandem hiérarchique est de vendre aux clients, et de satisfaire ceux-ci pour qu’ils reviennent. Ou peut-être l’un est un médecin et l’autre est un patient, et la tâche commune est de collaborer pour dispenser et recevoir des soins. Alors, dans la mesure – et seulement dans la mesure – où ils en ont besoin pour le bon accomplissement de la tâche, ils vont établir le minimum de relation nécessaire. Puis quand la tâche sera terminée, ils dissoudront la relation.Pour les Américains, la relation est secondaire par rapport à la tâche. La tâche est transitoire, alors la relation l’est aussi.[...]

Le primat de la relation


Quand deux Français se réunissent, ils n’ont pas en tête la référence à une même loi (ça se saurait), ni même à une loi quelconque. Ils recherchent une commune appartenance possible (même origine géographique, lointain cousinage, même formation…). Puis, ils établissent une relation et la renforcent et la cajolent. Enfin, si la relation est bonne, alors peut-être feront-ils une tâche ensemble. J’exagère un peu. Mais ce qui est clair, c’est que, si la relation n’est pas bonne, l’autre n’obtiendra jamais l’accomplissement de la tâche. « On ne peut pas faire ça à cause des assurances », « Il faut l’avis préalable de la commission », « Il manque des papiers », « Il faut que je demande à un responsable », « Revenez à 14 heures », etc. Pour les Français, la tâche est secondaire à la relation, et toute relation est supposée durer indéfiniment – en tout cas c’est l’idée qu’on s’en fait sur le moment.

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"Point de corps intermédiaires entre l'État et les citoyens" : un siècle de retard dans la science associative en France.



Le droit à association est un des grands droits démocratique. La République, dans une de ses logiques ne l'a pas accepté. Il faudra attendre 1901, et ce après vingt ans de débats politiques pour en faire un droit. Entre l’Etat qui s’occupe de l’intérêt général et les individus poursuivant leurs intérêts propres, point de salut pour l’intérêt commun. Dans la pensée républicaine, rien de bon ne peut sortir de la société civile composée d’individus poursuivant leurs intérêts particuliers. Il reste dangereux pour le bien commun de concurrencer l’Etat :

« Les citoyens d'un même état ou profession, les entrepreneurs, ceux qui ont boutique ouverte, les ouvriers d'un art quelconque, ne pourront, lorsqu'ils se trouveront ensemble, se nommer ni présidents, ni secrétaires, ni syndics, tenir des registres, prendre des arrêtés ou délibérations, former des règlements sur leurs prétendus intérêts communs (art. 2). » Loi Le Chapelier (14-17 juin 1791)

C'est à coup de forceps et motiver par l'anticléricalisme que le droit à association a été accepté mais sous condition d'exister dans un cadre législatif précis. C'est l'association loi 1901. voir au bas de la page.

La République française n'a pas permis aux français de développer un savoir faire dans le travail en équipe, dans le sens de l'intérêt commun. Le constat est accablant et marque la régression de la civilisation française : l'incapacité à travailler ensemble. Le seul référentiel existant est pauvre en création et en possibilité de développement, c'est la hiérarchie autoritaire (les chefs, les sous-chefs, les anciens,...).


Pour aller plus loin :